mardi 17 juillet 2012

Colis de vacances...

Chers lecteurs, vous voici déjà partis, ou sur les starting-blocks. Pour vous qui "sacrifierez" sûrement un jour ou l'autre de vos vacances à vous lâcher sur du junk-food (ça fait partie du plaisir!), je vous adresse quelques essais de réhabilitation de produits habituellement vilipendés mais, "étrangement" largement appréciés - l'interdit étant le meilleur des assaisonnements, ben tiens!
Votre servante, exilée pendant l'été dans une pampa où Internet n'a jamais mis le pied, vous reviendra en août avec de nouvelles historiettes qui, je l'espère, vous divertiront.
Bonnes vacances!



BIG MIC MAC

Je vous avais charitablement prévenus: une fois de temps en temps, j'ai à coeur de ruer dans les placards à provisions pour rebeurrer le blason d'un produit ou d'un plat à mes yeux injustement vilipendé. Cette fois, je pense vous confirmer mon goût pour vivre dangereusement en prenant la défense d'un monumental cauchemar culinaire: le hamburger. "Quoi?" vous entends-je suffoquer "en pleine période de fêtes, "elle" vient nous causer de latex galvanisé au lieu de pleurer de tendresse sur l'exquisité du foie gras ou le moelleux du chapon? Elle voudrait nous couper l'appétit qu'elle ne s'y prendrait pas autrement!".
Sachez, cher gourmet, que comme n'importe quel plat le hamburger peut se complaire dans l'abject comme confiner au sublime. Au fin fond de l'Arizona, dans un boui-boui où l'on avait vraisemblablement tourné Bagdad Café, n'ai-je pas vu servir à mon commensal qui n'en revenait pas un goûteux et grésillant steak haché vautré comme un pacha dans un épais divan de rondelles de tomates, d'oignons et de laitue iceberg croquante que chapeautait un petit pain tout chaud et croustillant; en sus, de belles grosses frites faites maison jouxtaient les traditionnels ketchup, moutarde douce américaine et cornichons à l'envi. Un sommet de simplicité, de fraîcheur de goût, rien à voir avec ces échafaudages plastifiés qui attendent sous une lampe chauffante d'être coffrés comme de la mauvaise graine dans des cachots en polystyrène expansé. Le verdict émerveillé fut tout simplement "c'est donc ça, un hamburger!". Alors, de même que votre chapon de batterie peut se révéler sec comme un ordre d'adjudant-chef à ses bidasses ou votre foie gras "tout-venant" rétrécir à la cuisson comme votre cachemire lavé à 95°, un humble burger composé de bons produits pourra vous propulser peut-être pas au 7ème mais au moins au 6ème ciel, ce qui n'est déjà pas si mal.

Burger et régime: terrain miné!

Si beaucoup d'entre nous ne répugnent pas à sacrifier à la dégustation d'une de ces improbables superpositions, nous affectons de nous en repaître à contrecoeur, pauvres brimés pavloviens que nous sommes suite aux cris de vierge effarouchée des diététiciens bien-pensants - bon, y z'ont pas tort... Aberration diététique? Le hamburger l'est certes, non pas tant par ce qu'il contient que par ce dont il manque cruellement, il faut l'avouer: de fibres, pour pomper une partie des matières grasses qu'il prodigue sans ladrerie (mayo, fromage fondu, bacon...). Pensez à la choucroute et au cassoulet, plats gras mais contrebalancés par des légumes riches en fibres (chou, haricots secs), véritables éponges à lipides.
Tout comme notre dagobert* ou sandwich à l'américain**, qui entre nous soit dit ne valent pas mieux: un support de pain blanc à index glycémique prohibitif, une arachnéenne feuille de salade et deux pauvres rondelles de tomate, le hamburger a 0/10 question fibres. Moralité: préférez le pain complet (certaines enseignes en proposent) mais surtout, passez du mortel au véniel en tapissant votre burger d'une couche de crudités épaisse comme un édredon suisse ou accompagnez-le d'une grande salade au lieu des traditionnelles frites - que personne ne vient critiquer, tiens tiens, serions-nous partiaux?

*en France, on l'appelle sandwich « américain » i.e.beurre, mayo, fromage, jambon, œufs durs, salade, tomate, bref tout l'bazar...
**tartare à la belge, càd riche en mayo et en épices



REHABILITATIONS, CHAPITRE II: LE KETCHUP

Je me propose, cher lecteur, et j'espère que vous m'agréerez, de consacrer de temps à autre cette rubrique à réhabiliter aux yeux du Vaste Monde - excusez la folie des grandeurs - un produit qui, à mon humble avis, est injustement vilipendé. Et je ne vous cache pas que...ça m'énerve!
Nous continuerons, si vous le voulez bien, notre croisade vengeresse par le Ô combien haï et stigmatisé ketchup, véritable martyre en bouteille. Ce dernier m'a un jour valu une lapidation en règle par une grand-mère écumant de rage parce que j'avais osé, crime contre l'Humanité, poser le flacon rouge sur la table de ses petits-enfants. C'est donc les joues encore cuisantes de cette humiliation qu'en avocat du Diable bon teint je citerai pêle-mêle quelques-uns des mille reproches que l'on fait à ce condiment et y répondrai point par point.
1. c'est plein de sucre: bien sûr! Mais au regard des 60 % présents dans la confiture que nous étalons sans arrière-pensée sur nos tartines quotidiennes, que sont les 24 % de la cuiller à soupe de ketchup au coin de l'assiette?
2. c'est américain, et comme chacun le sait tout ce qui vient de des USA c'est de la ...:
a) ceux qui pensent cela n'y connaissent rien. Croire que cette cuisine se résume au fast-food de bas étage, c'est parler sans savoir
b) en plus, même pas vrai! Le ketchup est originaire de Chine et ce sont les étrangers séduits qui l'ont importé chez eux
3. c'est malsain...Faux!
a) riche en sucre certes, mais presque 0 % de matières grasses contre les 75 % de la mayo (sans compter le cholestérol...) dont nous nappons nos frites belges en toute bonne conscience
b) c'est plein de lycopène, un merveilleux antioxydant présent dans la tomate et à plus haute dose encore lorsque celle-ci est cuite et très réduite; alors, à moins d'adorer votre tube de double concentré, shootez-vous de temps à autres au ketchup
c) c'est très salé: certes (2,5%), mais bien moins que les encensés moutarde (5,7%), sauce soja (14.5%) ou nuôc-mam (encore plus!)...alors?
4. ça masque les saveurs: exact, mais, au même titre que tous les condiments, il suffit de ne pas en manger avec tout et de ne pas noyer l'aliment dessous!
Bref, modération en toutes choses mais ne vous privez de rien, comme disait le grand philosophe inca Lascar Tétrapac...
En bonus, voici la mini-recette créée par ma Maman, version allégée de l'avocat cocktail où la chair d'avocat remplace la mayo:
pour 4, écrasez à la fourchette la chair de 2 avocats bien mûrs, arrosez d'un trait de xerès sec, ajoutez 2 cuill.à soupe de ketchup et quelques gouttes de tabasco. Salez peu ou pas du tout, mêlez-y 125 g de crevettes grises cuites et décortiquées, remettez dans les demi-écorces évidées et servez avec du pain, toasté ou non.
Et celle de mon amie parisienne Aude: toast légèrement beurré surmonté d'oeufs brouillés bien crémeux, de fines tranches de lard fumé croustillant et ponctué çà et là de gouttelettes de ketchup!




TO PEA OR NOT TO PEA...NUT BUTTER

Je sais, cher et fidèle lecteur, je vous ai jusqu'à présent habitué à un humour subtil et raffiné, tout en nuances et en légèreté...et voilà que je vous assène ci-dessus un piètre jeu de mots de bas étage pour tenter de vous faire avaler aujourd'hui un pavé, que dis-je, un parpaing de mauvaise réputation. Que ne faut-il pas inventer pour faire passer la pilule?
Vous vous rappelez certainement qu'il y a quelques semaines, j'ai entamé une croisade de réhabilitation de certains produits généralement haïs. N'écoutant que mon courage et faisant fi du qu'en dira-t-on, je me suis efforcée d'adoucir le regard sévère que, peut-être, vous portiez sur le ketchup. Me revoici aujourd'hui avec une substance si communément décriée en nos pays latins qu'en comparaison, la célèbre sauce rouge fait figure de produit encensé...eh oui, je me fais cette fois l'avocat non pas du diable mais de Belzébuth, Asmodée, Satan, Kali et le Yéti réunis en un seul pot, s'il fallait en croire ses innombrables détracteurs: j'ai nommé, presque en tremblant tant je crains votre réaction horrifiée, le beurre de cacahuètes.
"Quoi? Cette pâte immonde inventée par ces Amerloques qui obésifient la population de la planète en diffusant de tels cauchemars diététiques?"
Raté: ce "beurre végétal" est d'origine multiculturelle: américaine oui, mais aussi africaine, dont il agrémente de nombreuses recettes, ou encore indonésienne, où il constitue la base liante de la traditonnelle sauce satay qui accompagne les brochettes; les anciens colons hollandais, séduits par cet ingrédient, l'ont ramené dans leur pays et l'ont adopté avec bonheur et sans chichis sous le nom de pindakaas. Sont-ils, je vous le demande, plus gros ou en moins bonne santé que nous?
"D'accord...mais c'est monstrueusement gras! Non seulement c'est constitué d'un fruit oléagineux mais en plus on a le vice d'y ajouter de l'huile, des fois qu'y en aurait pas assez, ainsi que sucre et sel. Trop gras pour moi!" termine notre compatriote indigné tout en actionnant au-dessus de son cornet de frites au blanc-de-boeuf la pompe à mayo et houspillant le gamin pour qu'il achève fissa sa double tartine beurre-choco à tartiner avant d'aller faire ses devoirs...
"Ouais, raillez! Il n'en reste pas moins que c'est proprement immonde! Ca colle au palais, les papilles en sont plâtrées pendant des heures après ingestion, on dirait du mastic mais on ne peut même pas s'en servir pour colmater les fissures de la salle de bain, c'est pas étanche et ça schlingue...".
Là, je m'incline, car il s'agit d'une question de goût. Une personne qui m'est proche et qui, si elle manque peut-être d'indulgence ne manque pas d'humour, n'a-t-elle pas un jour qualifié cette pâte d' "atteinte aux Droits de l'Homme"?
A ce genre de réflexion, je ne rétorque pas mais fais simplement remarquer qu'une saveur un peu "sauvage", il faut avoir grandi en sa compagnie. Ancienne écolière américaine, ma tartine du goûter recouverte de cet enduit sulfureux me comblait d'aise, et en cela je ne me démarquais pas de mes camarades qui se délectaient autant que moi. Comprenez donc: les Anglais raffolent d'une certaine pâte à tartiner salée appelée "marmite" (prononcer "marmaït") à base d'extrait de levure et de viande, ça ressemble plus ou moins à un cocktail d'Oxo et de Viandox très épais, très salé; ils en sont si friands qu'ils en ont même créé une version pour végétariens. Personnellement, je trouve ça...hum...enfin, vous comprenez, quoi...mais si, toute petite, ma Maman pleine d'amour en avait badigeonné ma tartine et me l'avait tendue avec des yeux gourmands qui me promettaient mille délices, ne serais-je pas aujourd'hui férue de cette barbare tartinade?

un peu de diététique ne nous ferait pas de mal

Oui, le beurre de cacahuètes, c'est gras. Selon les recettes diverses, le taux de M.G. oscille entre 50 et 75%. Beurre et mayo: 82% dont beaucoup de graisses saturées. Les graisses du peanut butter sont 100% végétales et majoritairement insaturées; et si vous voulez vraiment vous la jouer light, adoptez le beurre de cacahuètes africain (100% cacahuètes, et juste un tout petit peu de sel) ou, mieux encore, sa version bio (100% arachides bio, sans sel ni sucre ajoutés); seul inconvénient, comme il ne contient pas d'émusifiant l'huile surnage et il faut touiller avant utilisation, au risque de plier la petite cuiller en argent de la ménagère de Tante Eusébie.
Très riche en protéines végétales, cette pâte est un atout précieux pour végétariens-liens de tout poil (ouh, encore un mauvais jeu de mots...)
En version 100%, il est exempt de cholestérol et riche en oméga 3. Attention toutefois à l'adjonction de graisses hydrogénées et "trans" dans certaines versions: lisez les étiquettes.
...et puis comme dit mon éminente amie diététicienne le Dr G. Padsellulit, le peanut butter ne fait pas grossir, au contraire: badigeonnez-vous donc cuisses et fesses de cette pâte huileuse, et vous vous "glisserez" sans peine dans votre jean slim préféré!





L'ÂGE DES GLACES: MIROIR AUX ALOUETTES?

Je sens qu'en cet été avec ses douces journées qui s'étirent dans une tiède langueur, j'ai envie de réveiller au fond de vous, chers lectrices et lecteurs, une réminiscence proche ou lointaine que votre coeur d'enfant recèle peu ou prou, j'en jurerais.
N'avez-vous pas rêvé maintes fois, de retour de la plage où vous abandonniez au grignotage des vagues votre mirifique château de sable, devant ces panneaux cartonnés plus grands que vous où des photographies de cornets de glace plus vrais que nature étalaient sous vos yeux de sensuelles volutes glacées? Rappelez-vous donc, l'eau vous venait à la bouche à la vue de ces merveilles multicolores et vous ne manquiez pas de mendier au parent qui vous tenait la main, parent qui lénifié par un bon bain de soleil était facile à corrompre...
Victoire obtenue, le vendeur de glaces ouvrait devant vos yeux son coffre aux trésors d'où il exhumait d'entre les doublons et diamants de glace le cornet que vous aviez choisi avec fascination. Quelle était alors votre déconfiture lorsque, au déshabillage de celui-ci, vous constatiez que depuis l'époque sublime de sa prise en photo votre cornet avait pris un terrible coup de vieux: qu'était devenue cette babylonienne ziggourat de glace vanille dont l'onctueux spiralé laissait déferler des fontaines de coulis de chocolat ou de fruits, où étaient passés les jardins suspendus de noisettes grillées ou de pépites de fraise qui ponctuaient de leurs croquantes scintillances ces merveilleuses architectures hélicoïdales? Dans votre menotte ne se (main)tenait plus qu'un pauvre hochet tordu, une gaufrette molle surmontée d'un triste amas informe et ratatiné où la crème glacée, quand vous aviez la chance qu'elle ne fût pas émaillée de désagréables cristaux de glace dus à de piètres conditions de conservation, mêlait sans coquetterie sauce et noisettes sans plus guère les arborer avec élégance comme sur la trompeuse photo. Et alors, désolé devant ce cornet qui, bien que nappé de pseudo-chocolat censé imperméabiliser le croquant de la gaufrette contre l'humidité de la crème glacée - et plus que probablement troué à sa base, ce qui transformait votre menotte en pot de colle - vous soupiriez à l'idée de ce pays de Sémiramis qui vous proposait, trompeuses chimères, des glaces en cornet dont la beauté et la saveur vous auraient transporté au 47ème ciel...

Pour vous consoler de cette déconvenue enfantine et aussi pour que vous profitiez des délicieuses et très parfumées fraises d’été - ou d’automne, dites "remontantes", je vous propose ci-dessous une recette de ma grand-mère. Dérisoirement facile et rapide et facile à réaliser, elle vous comblera d'aise!

La glace aux fraises de Zoetie
mixez 500 g de fraises très goûteuses avec le jus d'un demi-citron et 500 g de sucre glace, mêlez-y 500 g de crème fraîche fouettée (à 40% de mg!) puis versez dans un moule en couronne ou à cake. Congelez, c'est tout!
Cette glace méga-riche ne nécessite pas de sorbetière; pensez cependant à la sortir du congélateur une dizaine de minutes à l'avance pour qu'elle soit au summum de son onctuosité; et n'allez pas me la travestir sous monts de chantilly et tombereaux de biscuits ou meringues, elle se suffit à elle-même et puis elle est déjà bien assez "grave" à elle toute seule..hum! Tout au plus, votre dictatrice préférée vous concède-t-elle quelques belles fraises entières en décoration.


(  textes publiés dans Le Vif-Weekend  en 2009, www.levifweekend.be)